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Chroniques
Baroque Académie
Le Jardin des Voix, édition 2007
Mise en place par Les Arts Florissants et dirigée par William Christie, Le Jardin des Voix est une académie qui a pour but de former de jeunes chanteurs en amont puis au cours d’une tournée reliant les plus grandes scènes du monde. Sa première édition voit le jour en 2005, au Théâtre de Caen (lieu de résidence du célèbre et vénérable ensemble baroque créé voilà plus de trente ans maintenant), avant de revenir tous les deux ans depuis. C’est l’édition de 2007 qui nous concerne aujourd’hui, puisqu’elle se trouve au centre du documentaire aux figures attachantes réalisé par Priscilla Pizzato et Martin Blanchard.
Cousine de célèbres émissions de télé qui éliminent les apprentis chanteurs de variété jusqu’à conserver une seule perle rare, Baroque Académie propose en premier lieu d’assister à des auditions qui débutent au Conservatoire National Supérieur de Paris, en mars 2006. Chacun, nous dit la voix off, a quinze minutes pour convaincre le jury composé du chef William Christie, du claveciniste Kenneth Weiss et de Jacqui Howard, déléguée artistique. Dans cette salle comme dans les suivantes résonnent Händel (Alcina, Orlando, Saul, Giulio Cesare), Purcell (King Arthur) et Rameau (Pygmalion, Dardanus, Hippolyte et Aricie, Castor et Pollux).
La sélection se veut impitoyable : parmi près de deux cents candidats, seule une dizaine est retenue qui allie une technique solide, un « timbre touchant » et une certaine intelligence du texte. Comme il est courant dans le genre de programme télévisuel évoqué plus haut, nous suivons en parallèle le quotidien de quelques élus. Même parmi les novices – l’Italienne « au milliard de trilles » qui abandonna le violon un an seulement avant l’audition –, le chant est au cœur des existences, qu’on soit choriste à l’Opéra de Genève ou soliste de concerts privés. Rêves de célébrité et souvenirs de sacrifices sont aussi évoqués.
Une fois achevées d’autres auditions (Brooklyn Academy of Music de New York, Opéra Garnier, etc.), un an plus tard, le train emporte vers Caen Claire Megnaghi (soprano, vingt-neuf ans, Israël), Laura Hynes Smith (soprano, vingt-neuf ans, États-Unis), Nicholas Watts (ténor, vingt-neuf ans, Royaume-Uni), Amaya Dominguez (mezzo-soprano, vingt-sept ans, France), Pascal Charbonneau (ténor, vingt-sept ans, Canada / Québec), Sonya Yoncheva (soprano, vingt-cinq ans, Bulgarie), Michal Czerniawski (contreténor, vingt-cinq ans, Pologne), Juan Sancho (ténor, vingt-quatre ans, Espagne), Jonathan Sells (basse, vingt-quatre ans, Royaume-Uni) et Francesca Boncompagni (soprano, vingt-deux ans, Italie).
Cette seconde partie nous plonge au cœur de trois semaines de répétitions durant lesquelles – en compagnie de Christie, Weiss et Agnew notamment – les stars en herbe apprennent à positionner leur corps en mouvement, gérer la respiration, théâtraliser les émotions ; bref à se porter au delà des notes. Le jour du concert caennais qui ouvre la tournée avec un programme allant de Monteverdi à Haydn, la tension est palpable dans soli et arie d’ensemble, mais les concerts suivants montrent nos apprentis plus à l’aise. Depuis, certains sont devenus des artistes à part entière, ce qui n’est que justice.
LB